Petit Thêatre en Noir et Blanc
Le rideau s'écarte, et laisse apparaître la scéne. Vide. pas de décor, aucun objet.
Un homme en costume blanc se tient au centre, tête baissée.
Le public. des hommes et des femmes en noir. Aucune ne ressort du groupe. Tous fixent attentivement l'homme sur scène.
Celui ci relève la tête. Ses yeux sont vides, dénués de toute émotion.
il parle.
"Ce soir. Vous êtes venus voir notre représentation. Vous savez pourquoi vous êtes là, et ce qu'ils va se passer cette nuit."
Une femme, en costume blanc, rentre par le côté droit de la scène.
Elle porte un objet entre ses mains. Noir.
"Ce
soir, reprend l'homme sur scène, ce soir vous allez découvrir que la
vie a un sens, et que chaque instant vaut la peine d'être vécu. Je peux
vous ouvrir les yeux. Considérez que tous ceux qui ressortiront auront
eu peur, auront tremblé sur leur siège."
Les spectateurs fixent.
La femme en costume blanc donne l'objet à l'homme.
L'homme le pointe vers le public.
"Ce
soir, l'un d'entre vous mourra et ne se relévera pas. Les autres
rentreront chez eux, la sensation d'avoir survécu à l'épreuve."
L'homme en costume blanc ferma les yeux, et tira.
Pas un mouvement. Le silence.
Puis le chaos. Tous se levèrent et applaudirent, en proie à une exhaltation intense.
Seul
une forme noire resta sur son siège. Une jeune femme, d'une vingtaine
d'années, avait les yeux grands ouverts. Elle ne souriait pas. Le
rideau de satin noir se ferma lentement, sous un tonnerre
d'applaudissements.
Chacun rentra chez soi,un sourire aux
lèvres. La vie leur paraissait désormais meilleure et pleine de
possibilités. Maintenant qu'ils avaient frôlé la mort, tous
avaient une folle envie de vivre.
Dans la salle obscure, du rouge. Du
rouge suintant d'un siège se déversait par terre, et coulait
le long des marches. Une silhouette ne souriait pas. une silhouette
avait été oubliée ce soir dans la salle.
Je suis l'inventeur du petit thêatre en noir et blanc...moi qui vous raconte cela, tous le soirs je me tiens dans la salle, parmi tous ces inconnus. Et secrétement, j'espère qu'un beau jour ce sourire, qui orne en ce moment mon visage, disparaîtra. J'aurai enfin une raison d'être heureux.